octobre 3, 2025

CYBERCRIMINALITÉ TRANSNATIONALE: Trois Ghanéens arrêtés et extradés aux États-Unis

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Arrêtés à Accra puis extradés début août vers les États-Unis, trois Ghanéens sont poursuivis pour avoir dirigé, entre 2016 et 2023, un vaste réseau d’escroqueries sentimentales en ligne. Le FBI les accuse d’avoir extorqué près de 100 millions de dollars à leurs victimes, principalement en Occident.

Dans les bureaux climatisés du FBI à Washington, l’affaire est présentée comme une victoire majeure contre la cybercriminalité. Après plusieurs années d’enquête, trois ressortissants ghanéens, âgés de 36 à 40 ans, ont été arrêtés à Accra puis extradés vers les États-Unis. Les autorités américaines les accusent d’avoir dirigé une organisation criminelle qui a extorqué près de 100 millions de dollars en sept ans.

Ces escroqueries sont connues sous le nom d’« arnaques aux sentiments ». Derrière des profils séduisants, créés de toutes pièces sur les réseaux sociaux, ces hommes surnommés « les présidents » piégeaient des victimes vulnérables, souvent âgées et isolées. Les escrocs n’agissaient pas seuls. Autour d’eux gravitaient des dizaines de complices répartis entre l’Afrique de l’Ouest et l’Europe, chargés de blanchir l’argent et de rendre les transactions quasiment indétectables.

« Ils fonctionnent en réseau. Il n’est pas rare que trois escrocs travaillent sur la même cible en parallèle », explique Suleman Lazarus, chercheur en cybercriminologie. « L’argent circule ensuite entre plusieurs pays, comme la Côte d’Ivoire ou le Cameroun, avant de revenir à l’organisateur. »

En Afrique de l’Ouest, le phénomène est loin d’être marginal. Au Nigeria, on les surnomme les « Yahoo Boys » ; au Ghana, les « Sakawa Boys ». Dans certaines communautés, ces arnaqueurs bénéficient même d’une forme de reconnaissance sociale. Leur richesse soudaine, réinvestie dans des activités artistiques ou redistribuée localement, leur confère une légitimité qui brouille les frontières entre illégalité et réussite.

Mais derrière cette façade de glamour, les dégâts humains sont considérables. Les escrocs exploitent les nouvelles technologies et recourent désormais à l’intelligence artificielle pour modifier leur voix ou créer des photos et vidéos plus réalistes que jamais, piégeant ainsi davantage de victimes.

Isabelle, 62 ans, en a fait les frais. Isolée après un divorce et une retraite précoce, elle est approchée en 2021 par un homme se présentant comme un acteur péruvien. Six mois de conversations intenses suffisent pour établir un lien de confiance. Puis viennent les demandes d’argent. Au total, Isabelle a versé près de 29 000 euros. « C’était comme une drogue. Je ne pouvais plus m’arrêter. Il m’a coupée de mes enfants, je me suis retrouvée seule et brisée », raconte-t-elle aujourd’hui, la voix tremblante.

Comme elle, des milliers de victimes s’organisent sur les réseaux sociaux au sein de groupes de soutien et de prévention, tel « Assistance aux victimes d’arnaques sentimentales ». Mais ces initiatives restent insuffisantes face à l’ampleur du phénomène.

Les chiffres parlent d’eux-mêmes. Rien qu’aux États-Unis, les escroqueries en ligne ont bondi de 33 % en 2024, atteignant près de 16 milliards de dollars. Derrière ces statistiques, il y a surtout des vies brisées, comme celle d’Isabelle.

L’arrestation et l’extradition des trois Ghanéens marquent une victoire judiciaire, mais la bataille contre les arnaques sentimentales reste loin d’être gagnée. Tant que la solitude et la crédulité trouveront un écho dans le virtuel, les escrocs continueront de prospérer à l’ombre des réseaux sociaux.

Iréné N’KOUE (Stagiaire)

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