LOI 2015-08 PORTANT CODE DE L’ENFANT AU BÉNIN: Une décision mi-figue, mi-raisin de l’avis du Juriste et du Sociologue

À l’image d’un pavé jeté dans une marre, la résurgence de la loi 2015-08 du 08 décembre 2015 portant code de l’enfant en République du Bénin, depuis quelques heures, crée une avalanche de réactions tant sur la toile que dans le pays. A Parakou, la situation fait rage et divise sur plusieurs points.
Plusieurs questions sur cette loi qui date de 2015, taraudent les esprits. Parmi elles, figure celle sur l’article 141 qui stipule que : ‘’tout enfant conçu doit être reconnu par son géniteur dans les trois premiers mois de la conception par les moyens d’une déclaration sur l’honneur faite devant l’autorité administrative la plus proche du lieu de sa résidence, faute de quoi, l’enfant, à sa naissance, porte le nom de sa mère.’’ Si pour certains cet article vient à la rescousse des jeunes filles victimes de l’irresponsabilité de certains hommes qui fuient quand une grossesse survient, pour d’autres cela réconforte plutôt ces mêmes hommes dans leur position. Sur d’autres langues on peut entendre dire qu’il y aura de nombreux enfants sans actes de naissance.
Dans cet imbroglio, seul l’avis des spécialistes en vaut la chandelle. Rapproché du Docteur Soumaila Tamou SOUNON, Juriste en droit privé et assistant à la faculté du Droit et de science politique à l’Université de Parakou, il affirme que nul n’est censé ignoré la loi et cette loi vient rendre obligatoire la reconnaissance de l’enfant et de l’encadrer d’un délai. Selon ses dires, le fondement de cette loi est l’article 141. Il explique : ‘’dans cet article le législateur parle de l’enfant conçu parce que le code dans sa quatrième partie, parle de la protection sociale de l’enfant et dans cette protection sociale, le législateur fait la différence entre l’enfant conçu et l’enfant né.’’
Ainsi donc dans ces mesures de protection, le législateur a introduit la reconnaissance dans les trois premiers mois. Bien avant la mise en vigueur de cette loi, tout géniteur soit le Père ou la Mère allait déclarer la naissance de sa progéniture mais la reconnaissance pallie aux effets notamment les erreurs d’orthographe, absence de l’acte de naissance et bien d’autres. Puisque le législateur ne peut en voulant réparer détruire, le Juriste en droit privé et assistant à la faculté du Droit et de science politique à l’Université de Parakou affirme que : ‘’au-delà de tout, tous les enfants auront leur acte de naissance puisque tout enfant a une Mère et il n’y a quasiment pas de doute sur la maternité et la Mère a un nom que l’enfant portera.’’
À cette allure, on risquerait d’avoir des actes de naissances sur les lesquels ne vont figurer le nom des géniteurs. Si tel est le cas, en cas de disparition total du géniteur ou du refus, quel regard la société portera sur cet enfant ? Le socio anthropologue Prudent FAGNIBO explique : ‘’une chose est d’avoir une loi mais l’autre est de l’appliquer en tenant compte du contexte sociologique dans lequel les individus se trouvent. Nous sommes entrain de régler un problème mais un autre se crée. Même si un jour la maman explique la situation à l’enfant ; le fait qu’il porte son nom de famille, l’enfant peut se rebeller contre son père. Du moment où l’enfant se rend compte qu’il signe le nom de sa mère, il commence par interroger sa mère sur sa naissance. Mais lorsque l’enfant va grandir et avoir une idée sur l’adultère, il va se demander si ce n’est pas par adultère qu’il est conçu, comment se fait-il que je n’ai pas un Père. Lorsque les amis vont voir le nom de la Mère comme son nom de famille, ses amis vont commencer par l’appeler ‘’enfant bâtard’’. C’est un concept qui existe et nous sommes dans un régime patriarcal.’’
De toute façon, le privilège que les hommes ont d’attribuer leur nom à leurs enfants, leur est retiré. Passé les trois mois de la conception, ils n’auront plus la possibilité de revenir réclamer la paternité de l’enfant. En Afrique, c’est une fierté pour l’homme et pour la famille d’attribuer son nom et de le voir circuler. A cette allure, tendons-nous vers la disparition du régime patriarcal au Bénin ?